Le premier souvenir de Kikunae date de ses trois ans. Avant cet âge, c'est le vide totale dans sa mémoire. Il est seul, dans le domicile familial, sa petite famille vient d’emménager dans la ville d'Imari. Il est assis sur le sol, près d'une grande porte coulissante. D'ailleurs, toutes les portes et les fenêtres sont ouvertes... exceptée la porte d'entrée. Le ciel bleu se reflète dans ses yeux de la même couleur, le vent léger fait virevolter ses cheveux noirs aux reflets bleutés. Ses mains et ses genoux sont colorés de multiples traits de feutres. Sur le sol, il y a quelques feuilles éparpillées et du matériel de dessin. Le petit garçon n'a qu'une expression impassible sur le visage, il semble impénétrable, voire sans émotion. Au moment où il se met à soupirer lentement, quelqu'un toque jovialement à la porte. Le bruit retentit dans la grande maison traditionnelle jusqu'à parvenir à ses oreilles. L'enfant se lève et marche avec facilité vers la provenance du bruit. Il pose sa main sur la poignée avant de la tourner pour découvrir un jeune garçon plus âgé que lui. Il a les cheveux marrons et des yeux verts comme le feuillage d'un bel arbre. Il a l'air tout ce qu'il y a de plus gentil, il semblait d'une pureté infinie. Sur ses lèvres se dessine un grand sourire tendre et amical. Il tend une boîte en bois, joliment décorée et scellée d'un fil robuste. Kiku se prépare à la saisir, mais finalement il renonce et pose sa main fragile sur sa cuisse.
« Tu dois être Kikunae ! Je m'appelle Tsunemori Naoya, je n'habite pas très loin de chez toi. Voici un cadeau de bienvenu de la part de ma famille ! déclara-t-il aimablement »
Tout d'abord, l'enfant ne dit rien, plantant son regard perçant dans celui du nouveau venu. Ce Naoya, il semblait vraiment être quelqu'un de parfait... aimable, poli, attentionné, délicat... Ses défauts semblaient êtres des plus minimes. Étrangement, Kiku fut déstabilisé face à ce spécimen rare. Il détourna du regard tout en prenant la boîte, refuser aurait été être déloyal à tant de bonté...
« Moi, c'est Rin, souffla alors le petit garçon
- Ah, ah ! Tu as de la répartie pour un petit garçon de ton âge ! Tu es rigolo... Désolé, mais pour moi, ça sera Kikunae, répondit-il, tirant la langue de manière bon enfant
- Si ça peut te faire plaisir.
- Tu es peu bavard en plus de ça... Je vais devoir y aller ! On se reverra bientôt Kiku-chan, j'en suis persuadé !
- Ne m'appelle pas -cha... »
Le brun se coupa, Naoya s'était déjà échappé. Il était parti aussi vite que le sable qui glisse entre les doigts. L'enfant resta indifférent, bien qu'il ait été contrarié que celui-ci l'ait appelé « Kiku-chan ». Il rebroussa chemin, fermant la porte derrière lui. Malgré son âge, Kikunae était un garçon débrouillard. Ses parents exerçait un métier qui les contraignaient à souvent quitter la maison. Habituellement, ils faisaient appel à une baby-sitter, seulement, comme les Togashi venait juste d'emménager, ils n'avaient pas eu le temps d'en trouver une bonne. Oui, une bonne, car les parents de Kiku faisaient très attention à qui ils confiaient leur fils. Le petit garçon s'installa là où il était avant d'être dérangé, attendant ses parents qui étaient censés, ce jour-là, revenir le soir même.
Le lendemain, Naoya vint à nouveau chez le petit Rin alors que ses parents avaient déjà filé. Il lui apprit alors qu'il serrait désormais en quelques sortes sa nouvelle... « nounou ». Malgré ses sept ans, Naoya était qualifié par ses parents comme quelqu'un de serviable, mature et prudent. Comme celui-ci avait proposé son aide gratuitement, les parents de Kikunae, hésitant au début, avait fini par accepter. Du coup, Naoya allait venir tous les matins s'occuper du petit brun, puis l'amener à l'école maternelle pour par la suite rejoindre l'école primaire. Le soir, il irait le chercher à l'école maternelle, lui ferait prendre son goûter, ensuite ils feraient leurs devoirs ensemble. Enfin, il lui donnerait le dîner et irait le coucher sans oublier de bien fermer la maison à clé. Beaucoup de responsabilités pour un si jeune garçon... et pourtant ! Les parents de Kikunae ainsi que les siens lui avaient donné toute leur confiance.
Au fur et à mesure du temps, Kikunae avait appris à s'habituer à Naoya et à ses « Kiku-chan » bien qu'il répétait sans cesse d'arrêter de l'appeler ainsi. Il est même correct de dire qu'ils étaient devenus amis, de très bons amis. Malgré les quatre ans qui les séparaient, ces deux-là étaient extrêmement proches même si le comportement de Rin ne permettait pas forcément de s'en apercevoir tout de suite. Naoya ne lui en voulait pas, il était comme ça après tout... calme, taciturne et inexpressif. Souvent, en rentrant de l'école, Naoya amenait Kikunae au parc, parc dans lequel ils faisaient de la balançoire ensemble. Naoya entamait alors une conversation bien que Kikunae répondait toujours de manière vague et par de petites sentences. Parfois, ils ne se disaient pas grand chose, il y avait, entre eux, cet espèce de petit jeu qui consistait à lire dans les pensées de l'autre... du coup, leurs regards se croisaient souvent longuement.
Kikunae ne s'exprimait très peu voire jamais sur ses sentiments. C'était constamment Naoya qui commencer à parler pour créer petit à petit un dialogue. Pourtant un jour, lorsqu'il était âgé de six ans, c'est Kiku qui engagea la conversation dans ce petit parc. C'était un de ces jours froids d'hiver, la nuit était tombée rapidement, une nuit splendide... étoilée. Les deux garçons étaient tout deux habillés chaudement pour ne pas attraper quelconque maladie. Comme d'habitude, ils s'étaient installés à la balançoire avant de se bercer lentement. Kikunae était resté tête basse, ses cheveux cachaient son visage légèrement rouge. Malgré son camouflage, Naoya remarqua ces petites rougeurs sur le visage de son ami lorsqu'il tourna la tête, ce qui l'étonna au plus haut point. Jamais il ne l'avait vu ainsi !
« Toi aussi, tu me quitteras un jour, Naoya, murmura-t-il dans un faible souffle éphémère
- Quoi ? Qu'est-ce que tu racontes ? questionna alors le garçon surpris par ses propos
- Maman et papa, ils m'ont déjà quitté, ils ne viennent pas souvent... et un jour... toi aussi, tu me quitteras. Les adultes ne restent pas longtemps avec moi.
- Kiku-chan... je... tu te sens seul... cela n'arrivera plus ! Je ne quitterai pas, je te le promets, déclara alors le brun avec conviction, un air inquiet sur le visage »
Le petit garçon leva lentement la tête, plantant son regard brillant de larmes retenues dans celui de son bon ami. Il resta la bouche entrouverte, les yeux clignant lentement... cet expression lui donnait l'air d'un enfant émerveillé. Kikunae était tout simplement surpris par... la simple réaction de son camarade. Naoya afficha un doux sourire en le voyant ainsi. C'est vrai que Kiku s'épatait des simples choses de la vie... Il se leva et se planta devant l'enfant avant de s'accroupir afin d'être à sa hauteur. Il prit ses petites mains emballées dans les siennes avant d'essuyer une douce larme qui venait de s'évader malgré les efforts de Kikunae.
« Ne pleure pas, Kiku-chan ! Je ne veux pas te voir pleurer... à part si ce sont des larmes de bonheur ! Rentrons prendre le dîner. »
Le garçon aux yeux bleus comme l'océan hocha lentement la tête, incertain. Il se leva, remettant correctement son petit cartable sur son dos avant de prendre la main de son ami, comme il avait l'habitude de le faire pour ne pas le perdre et aussi... comme signe caché d'affection. Il le suivit jusque chez lui et Naoya prépara, comme d'habitude, le repas, mangea en compagnie de Kikunae avant de le coucher et de rentrer tranquillement chez lui.
Ce petit jeu de « nounou » dura jusqu'à que Kikunae atteigne l'âge de treize ans. En effet, celui-ci ayant toujours été dégourdi, il était devenu en plus de cela très responsable. Du coup, ses parents avaient estimé qu'il était correct de lui offrir leur confiance. Malgré tout, les liens entre Naoya et Kikunae ne se sont pas pour autant détachés. Tous les jours, ils allaient à l'école puis rentraient ensemble. Chaque soir, ils allaient dans ce parc dans lequel ils s'aventuraient lorsqu'ils étaient plus jeunes. C'était devenu comme... comme une sorte de rituel... ou peut-être parce qu'une routine s'était installée entre eux. Seulement, un jour Naoya se rendit compte que Rin ne prenait pas le chemin de sa maison lorsqu'ils se séparaient. Bizarrement, il eut envie de savoir ce qu'il faisait tous les soirs lorsque leurs chemins se séparaient. Kiku s'arrêta finalement au bord de la rivière Matsuura. Naoya décida de rester caché un peu plus loin, afin d'en savoir plus. Que faisait-il à la rivière en pleine nuit ? Ses pensées furent coupés lorsqu'il vit que son ami se mit à se déshabiller. Le jeune homme se mit à rougir avant de soupirer de soulagement : il avait en fait un maillot de bain de dessous de ses vêtements. Le garçon à la chevelure de charbon sauta dans l'eau sous les yeux surpris de son ami. La nuit... il se cachait donc... pour nager. Pourquoi se planquait-il lorsqu'il qu'il nageait ? Il nageait divinement bien ! Il devrait plutôt être fier de lui et demander à ses parents de l'inscrire dans un club ! Naoya regarda Kikunae nager jusqu'à se faire, malheureusement, surprendre par celui-ci. La tête dans les nuages, il n'avait pas réalisé qu'il était sorti de l'eau.
« Qu'est-ce que tu fais là ? demanda alors le garçon en plantant son regard impassible dans celui de son camarade
- Ah... euh... rien ! Je passais ici par hasard et je t'ai aperçu... je me suis donc permis de venir t'observer ! répondit le lycéen embarrassé
- Tu m'as suivi.
- Non... euh... et bien... oui... je t'ai suivi. Par pure curiosité... et c'est très mal, je le sais, désolé ! Je voulais juste savoir... ce que tu faisais... j'ai remarqué que tu ne prenais pas le chemin de ta maison le soir. Pourquoi ne vas-tu pas dans un club ? Tu pourrais aller loin ! Tu... tu es tellement doué !"
- Je ne nage pas pour la gloire, prétendit-il en détournant du regard
- Pourquoi... est-ce que tu nages, alors ?
- Pour être libre. Je me suis toujours senti différent au contact de l'eau et surtout depuis que j'ai appris à nager, l'année dernière.
- Je ne peux pas prétendre comprendre... pourtant, je vais essayer. Tu serais triste en club, n'est-ce pas ? Comme un poisson rouge dans un bocal...
- Oui. Je veux être libre.
- Je vois... je n'aurais pas du te déranger... je... je vais y aller.
- Ce n'est rien. Rentrons ensemble, déclara Kikunae en prenant ses vêtements sous le bras
- Tu vas aller en ville comme ça ?! s'alarma le lycéen
- Oui. Pourquoi ? Il y a un problème ?
- No... non... aucun ! »
Le garçon dévia son regard, se mettant à prendre la route tranquillement. Naoya le suivit un peu à la traîne. Il remarqua que, bien que son ami n'avait appris à nager que l'année précédente, il était déjà plutôt musclé. Il devait souvent s'exercer à la natation ! Il planta son regard dans celui du brun. Il se souvint alors des yeux qu'il avait vus lorsque Rin nageait. C'était un regard, comme il n'en avait jamais vu sur Kikunae. L'eau lui faisait un effet incroyable. Naoya ne put s'empêcher d'esquisser un léger sourire. C'était bien que son compagnon se soit trouvé une passion... c'était quelque chose d'important. Pour lui, c'était le basket-ball. Il faisait d'ailleurs parti de l'équipe du lycée et était devenu un élément irremplaçable.
Naoya avait prit l'habitude, petit à petit, d'inviter Kikunae chez lui pour manger. Kiku s'était donc familiarisé avec sa famille composée de ses deux parents et de deux frères et sœurs. Pendant un de ces agréables dîners, Naoya proposa à Kikunae d'aller au festival Ton-Ten-Ton de la ville d'Imari qui se déroulait fin octobre en compagnie de sa famille. Le collégien alors âgé de quatorze ans accepta poliment. Il ne fallut attendre que quelques jours pour que ce fameux festival ait lieu. Naoya s'était vêtu d'un kimono, comme il avait l'habitude d'en porter durant les festivals. Sous le plus grand étonnement de celui-ci, Kikunae s'était également habillé d'un kimono.
« Je ne savais pas que tu porterais un kimono ! Je n'étais même pas sûr que tu en ais chez toi, déclara le jeune homme, jovialement.
- J'en porte toujours durant les festivals, répondit simplement le brun en rougissant un peu. »
Les deux garçons rejoignirent le reste de la famille Tsunemori avant de se diriger vers ce fameux festival. Le frère et la sœur de Naoya restèrent avec ses parents tandis que les deux jeunes hommes prirent un chemin opposé. Ils profitèrent bien de l'événement, mangeant de délicieux mets, achetant des produits et regardant les animations. Finalement, lorsque la nuit peint totalement le ciel d'un bleu foncé profond, les deux amis se rendirent au parc. Ils s'installèrent, comme par tradition, sur la balançoire avant de se balancer un peu, tranquillement. Naoya afficha un doux et léger sourire, son visage semblait, soudainement, nostalgique.
« C'est notre premier festival, ensemble, constata-t-il
- Oui, répondit Rin, tremblant légèrement.
- Je me souviens encore de la promesse que je t'ai faite, ici même, il y a huit ans. Quand j'y repense... c'est plutôt romantique, proclama-t-il d'une voix quelque peu doucereuse
- Qu... quoi ? s'exclama Kikunae, rougissant un peu.
- Tu es gêné c'est mignon, ah, ah ! C'est l'effet que je voulais procurer sur toi. Malgré notre jeunesse, n'y avait-il pas une sorte de romance entre nous ?
- Nous n'étions que des en... enfants... Les enfant que savent pas ce qu'est l'a... l'amour...
- Tu te trompes... il n'y a pas d'âge pour aimer. Je pense que tu étais vraiment amoureux de moi, seulement... désormais... que ferais-tu si je t'embrassais ?
- Tu m'embrasserais à cause de l'ambiance ou... parce que tu m'aimes ? Réponds bien, hein ! Ma réaction à ton baiser dépend de cela... bafouilla le brun. »
Le garçon aux yeux d'émeraude ne répondit pas à la question de son camarade. Il s'approcha doucement du collégien qui ne semblait pas avoir l'intention de se débattre. Kikunae semblait totalement paralysé, incapable de faire quoi que ce soit. Il ferma les yeux le plus fort possible, apeuré, rougissant comme une tomate bien mûre. Son cœur battait vite, très vite. À vrai dire... il n'avait jamais eu de petite amie, ni de... petit ami... Il se demandait si c'était le cas de Naoya. Sûrement, vu la détermination qu'il montrait... Il s'interrogeait sur la sensation que procurait un baiser. Personne n'avait même effleurer ses lèvres. Il sentit alors des lèvres se poser sur les siennes. Il sentait la respiration chaude et plaisante de son ami sur son visage. Cela ne dura qu'une fraction de seconde, leurs lèvres ne firent que se frôler, pourtant... cela ne semblait jamais finir pour Kiku. Son cœur palpitait, tomber à la renverse, sortait de son corps, s'arrêtait et sa tête fumait comme une cocotte-minute. Il ne comprenait pas trop ce qu'il était en train de ressentir actuellement. De l'amour, de la gêne, du dégoût, du plaisir, de la passion ? Ce qu'il était sûr, c'est qu'il avait pris peur... pourquoi ? Il n'en avait aucun idée.
« Pour... pourquoi as-tu fais ça ? murmura le brun d'une voix mêlant une douce colère et panique
- Aaah... désolé, c'est à cause de l'ambiance ! Les festivals, tu sais... souffla-t-il de son air toujours enjoué, les joues légèrement teintés de rouge
- Je comprends, susurra Rin d'un ton presque sec. »
Après cela, les deux garçons se séparèrent, chacun rentra chez lui. Kikunae se sentit légèrement... vexé, rejeté, même. Il détestait les personnes qui embrassaient quelqu'un sans avoir aucun sentiment pour eux ! C'était douloureux... vraiment douloureux. Malgré tout, lorsque Naoya lui demanda de le voir le jour suivant, il accepta, se disant qu'il valait mieux oublier ce qu'il venait d'arriver la veille... que ça n'avait pas d'importance... il essayait de s'en persuader, mais c'était dur.. Il le rejoignit alors devant chez lui et tout deux se mirent à se promener tranquillement dans la jolie ville. Naoya semblait... préoccupé. Il ouvrait souvent la bouche, comme pour dire quelque chose et pourtant... il ne disait rien, il renonçait. Finalement, lorsqu'ils arrivèrent près de la gare, les deux adolescents allèrent se procurer des canettes puis ils s'installèrent sur les bancs vides de la gare. Le garçon à la chevelure marron leva la tête lentement, observant son ami. Leurs regards se croisèrent. Le lycéen afficha un sourire amical.
« Tu sais... tu devrais vraiment t'inscrire dans un club de natation... tu es tellement sublime, lorsque tu nages... Tu te ferais vite repérer et tu pourrais vivre de ta passion... ce serait extraordinaire, tu ne trouves pas ?
- Pas intéressé, répondit-il en fuyant du regard
- Je comprends que tu veux être... libre, seulement... tu rates une chance incroyable ! s'exclama-t-il, essayant de paraître gai
- Je ne nages pour que pour être libre. Je nage pour ceux que j'aime, pour mes parents, pour mes amis... pour... pour toi, Naoya, révéla-t-il, gêné.
- Ne nages pas pour moi, Kiku-chan, c'est... c'est inutile. Je pars pour continuer mes études à Tokyo.
- Co... comment ? »
Le collégien aux yeux bleus comme le ciel resta bouche-bée, les yeux écarquillés et les pupilles tremblantes. Il posa sa canette à terre, les mains frissonnantes. Finalement, il serra les poings, baissant lentement la tête. Ses cheveux ébènes cachaient son visage parfaitement pale. Il fronça légèrement les sourcils avant de planter un regard vif, désagréablement perçant dans celui de son compagnon. Il sembla soudainement d'une froideur extrême, à en glacer le sang et le cœur. Cela perturba le lycéen, qui resta la bouche entrouverte face à ce visage déstabilisant.
« Cette blague n'est plus drôle, murmura-t-il d'un ton sec.
- Je...
- Cette mauvaise blague a assez duré. Tu m'embrasses sans amour, tu ruines tes promesses... men... menteur ! Je n'aurais jamais dû te faire confiance. Je te hais, s’égosilla Kiku avec tristesse et haine. »
Le garçon se redressa violemment et tourna les talons avant de se mettre à courir, voulant quitter cet endroit au plus vite et surtout... ne plus voir le regard de Naoya... son visage... Il rentra chez lui et plongea directement dans sa baignoire qu'il avait remplie le matin même afin de prendre un bain plus tard. L'eau était désormais... son seul refuge. Il n'y avait plus qu'elle pour lui. Il n'y avait que dans l'eau qu'il pouvait se sentir apaisé. Il ne faisait qu'un avec elle, il lui appartenait. Naoya n'avait pas essayé de le rattraper. Il n'avait d'ailleurs donné aucune explication supplémentaire. De toutes façons, Rin ne voulait plus l'entendre.
Après le départ de Naoya, qui était parti, à ses yeux, comme un voleur, Kikunae décida d'arrêter la natation. Il ne nageait plus. Son seul contact avec l'eau était lorsqu'il s'immerger dans sa baignoire, c'est-à-dire durant presque tout son temps libre. Cette baignoire, c'était son refuge. D'ailleurs, il portait tout le temps son maillot de bain en dessous de ses vêtements, même en dessous son uniforme scolaire. La dernière année de collège passa agréablement vite et Rin, qui était assez doué à l'école, passa facilement au lycée. Le jour de la rentrée, un garçon l'aborda. Un garçon jovial, lumineux et... plutôt enfantin. Il possédait une courte, épaisse et frivole chevelure blonde ainsi que de grands yeux expressifs dont leur couleur était une sorte de rose-marron. Kiku était fatigué, presque soûler rien qu'en le voyant.
« Togashi Rin ?! Ouah, nous sommes dans le même lycée ! Ça fait longtemps ! Depuis que j'ai été transféré dans un autre collège, je crois... mais, nous nous revoyons à nouveau, c'est géniaaal !
- Qui es-tu ?
- Heiiin ? Tu... tu m'as oublié ? Rin-kun, ce n'est pas gentil, ça ! Je suis Sakuragi Nai ! Nous nous sommes rencontrés en primaire puis j'ai été transféré lors de notre deuxième année de collège !
- Oh. Je me souviens maintenant, déclara-t-il en continuant de marcher
- Rin-kun ! Attends-moooi ! »
Malgré les appels du garçon, Kikunae continuait d'avancer tranquillement, gardant son air imperturbable sur son visage. Malheureusement, le dénommé « Nai » continuait de le suivre et il découvrit également que celui-ci était dans sa classe. Quelle malédiction... Le peu de souvenirs qu'il avait de lui étaient qu'il était collant et qu'il criait sans arrêt... et sans arrêt. Ce genre de personnes... le fatiguait, seulement... peut-être devait-il faire un effort. Après tout, peut-être que ce Nai était quelqu'un d'agréable au fond... en plus, ils avaient été placés presque côte à côte... il allait bien falloir le supporter. Bien que cela puisse paraître étonnant, il ne fallut que quelques semaines pour que Nai et Rin « redeviennent » amis. Malgré le fait que Nai ait eu du mal à s'habituer que Kiku porte des maillots de bains en guise de sous-vêtements et ne puisse s'empêcher de sauter dans chaque point d'eau devant lequel ils passaient, il avait fini par trouver cela amusant, il s'était même mis en tête que sans cette caractéristique, Rin n'était plus Rin.
« Tu as déjà choisi un club dans lequel t'inscrire, Rin-kun ?
- Je ne m'y intéresse pas.
- Ah ? Pourtant... je m'étais dis que nous pourrions nous inscrire dans le club de natation, tous les deux, suggéra le petit blond.
- Je ne veux pas nager.
- Tu devrais ! Je nageais lorsque j'étais en primaire puis j'ai abandonné mi-collège malgré mon potentiel... c'est toi qui m'a redonné envie de nager ! Tu as un regard différent lorsque tu aperçois un point d'eau.
- Je... D'accord, accepta le brun, finalement
- Vraiment ? Nous allons nager ensemble, alors ?! Ouaais, allons-y tout de suite ! »
Le lycéen à la chevelure de charbon se laissa emporter par son ami blondinet qui était totalement surexcité. Sans surprise, ils furent acceptés tous les deux. Il y avait déjà de nombreux adhérents dans ce club qui semblaient tous plus doués les uns que les autres. Malgré tout, ils semblaient émerveillés par la nage de Kikunae. Celui-ci prenait cela d'un air modeste, il ne prenait pas la grosse tête mais ne se sentait pas intimidé non plus. Il restait modeste parce qu'il ne comprenait pas l'éblouissement de tous ces gens à son égard qui étaient sûrement tellement plus doués que lui. Le plus émerveillé restait tout de même Nai qui n'arrêtait pas de lui prendre ses mains et de lui dire qu'il était fantastique.
« Ce n'est rien de spécial, répondait-il toujours sous tous ces compliments. »
Lorsque les cours se terminaient, c'est tout ce que Kiku attendait... aller nager. De plus, tous les nageurs étaient tous extrêmement sympathiques et nager avec eux était un moment vraiment agréable qu'il ne pouvait rater.
Un jour, alors qu'il rentrait chez lui après une petite séance de natation, il vit la petite sœur de Naoya qui accourut d'une lenteur de tortue vers lui dès qu'elle l’aperçut. Le garçon resta là, planté comme un poireau. Il n'avait plus jamais revu la famille Tsunemori depuis que Naoya était parti... Pourtant, la petite sœur de Naoya, Chieko, ne semblait pas rancunière, elle semblait même assez heureuse de le voir... Elle l'invita même à prendre quelque chose à boire chez eux. Kikunae accepta poliment, il ne pouvait pas rejeter une telle invitation... la famille Tsunemori était une famille plus que respectable, il n'avait rien à leur reprocher, après tout... alors pourquoi refuser ? Il n'y avait personne chez eux, le frère de Chieko étant malade, leurs parents avaient dû l'amener chez le médecin. En attendant, la jeune fille était allée faire quelques courses essentielles. Ils étaient donc seuls dans la maison, Chieko et lui.
« Je ne sais pas si c'est le bon moment... ça fait presque un an qu'on ne s'est pas vu, je ne veux pas gâcher nos « retrouvailles »... seulement, je n'ai jamais su quand était le bon moment. J'ai hésité. J'ai voulu te le ramener chez toi, le mettre dans ta boîte aux lettres... j'ai renoncé. Du coup, je préfère profiter de l’occasion pour te le remettre en personne. Tiens, Rin, c'est un paquet que Naoya a laissé pour toi. »
Suite à ce long discours qui lui paraissait interminable, le garçon saisit fermement le paquet et n'ajouta pas un mot. Il ne savait pas vraiment quoi dire, ni quoi faire. Ne pas s'avancer plus sur le sujet semblait être pour lui une bonne chose. Il préférait parler d'autre chose, qu'elle lui parle d'autre chose et étrangement mais bien heureusement, c'est ce qu'elle fit. Comme si elle avait lu dans ses pensées. Lorsque le lycéen eut fini son verre de limonade, il salua la jeune fille et quitta le domicile, emportant avec lui, le fameux paquet. Ce n'est pas quelque chose de grand, juste une petite boîte entourée d'un fil solide. Il hésita avant de l'ouvrir, puis finalement, il prit son courage à deux mains. Il en sortit un petit porte-clés, un porte clé représentant une mignonne petite sirène. Le porte-clés était de qualité, tout était finement fait, même les cheveux. Elle avait été peinte de manière délicate, sûrement à la main. Au fond de la boîte se trouvait une petite bande de papier sur laquelle était écrit ces simples mots : « Lorsque tu nages, tu me fais penser à une gracieuse sirène. » Le garçon resta longtemps immobile, le regard rivé sur le petit objet qui tenait simplement dans le creux de sa main, ses paupières clignait de temps à autres. Il ne put s'empêcher de penser aux bons moments qu'il avait passés avec Naoya. Malgré le « mauvais coup », qu'il lui avait fait, tellement de mots mélioratifs lui venait à l'esprit pour le qualifier... Finalement, il décida de réunir les clés que ses parents lui avaient confiées à l'aide de son nouveau porte-clés. Celui-ci allait désormais partager sa vie, être à ses côtés tous les jours. Il pourrait ainsi repenser à Naoya avec une sorte de nostalgie heureuse. Chieko et Kikunae se virent plus souvent, puis au fur à et mesure du temps, il se virent tous les jours, juste après les cours. Parfois dans la maison Tsunemori parfois chez les Togashi et ils étaient tous le temps rien que tous les deux. L'un comme l'autre aimait passer un moment dans le calme et la sérénité, c'est pour cela que personne d'autre ne partageait ce moment avec eux. Comme avec Naoya et le parc, boire un jus de fruit, un soda ou un bon thé en compagnie de Chieko était devenu une sorte de rituel. Malgré que ce soit la sœur de Naoya, elle était totalement différente de lui. Elle possédait une longue chevelure rouge, de beaux yeux de la même couleur, voire limite roses et était âgée d'un an de moins que Kiku, ainsi elle était encore collégienne. C'est une jeune fille calme, très calme qui avait pour passion de dormir. Les conversations étaient longues avec elle car non seulement elle faisait de longues phrases et en plus, elle parlait lentement. Il était possible de parler de tout et de n'importe quoi avec elle et c'était une qualité. Ils étaient capables de discuter à propos du temps, des escargots, de la mer, d'amour, des dangos, de poulet, de poulpes, des fleurs, d'écologie, d'astrologie, de terre, des tomates, de neige, des chiens, des chats, de musique, de films... Elle dégageait tout de même quelque chose de soporifique, c'était quelque chose d'assez peu commun. Rin avait failli s'endormir de nombreuses fois en sa compagnie... Elle-même semblait somnolait tout le temps.
« Je suis en train de réaliser que je n'ai jamais su la raison pour laquelle mon frère et toi... vous vous êtes disputés. Certes, il parlait souvent de toi, pourtant, il ne parlait jamais de vous deux, de votre relation... seulement de toi. Pour nous annoncer que vous vous étiez disputez, il a simplement dit... que tu le détestais, sans élargir plus le sujet, discourut-elle
- Il n'y rien d'intéressant à savoir.
- Qu'est-ce qui n'est pas intéressant ? Tu réponds toujours par des réponses vagues... c'est la raison pour laquelle vous vous êtes disputés qui n'est pas intéressante ?
- Oui. »
Chieko n'en dit pas plus, changeant avec amabilité de sujet, enchaînant tout naturellement. Cette capacité que Chieko avait à éviter les sujets qui fâchent était très avantageuse. Cela lui abstenait d'être gêné avec quelqu'un qui insisterait ou pire... de s'énerver. Nai, qui avait su où habitait Kiku par on ne sait quel moyen, avait fini par s'inviter à leur petit moment privilégié de calme. Ce gars-là... il était vraiment collant. Pourtant, Rin ne le blâmait pas. Après tout, c'était un des traits qui le caractérisait... il ne serait plus Nai s'il n'était pas collant... et puis cette caractéristique le rendait assez attachant. De plus, le fait que Nai se soit incrusté ne semblait pas déranger Chieko, elle était la même, somnolente et molle. D'ailleurs, Nai, habituellement excité comme une puce, ne brisait pas ce moment de sérénité... il était, avec la magie la plus sainte, endormi par les somnifères diffusés par la présence de Chieko.
L'année se termina assez rapidement, surtout lorsque les examens arrivèrent. Kikunae n'eut pas grand mal à passer en deuxième année, ce qui ne fut pas le cas de Nai qui se fit aider aimablement par Kiku. Bien heureusement, tous les deux passèrent en classe supérieure et restèrent, à la plus grande surprise de Kikunae, dans la même classe. Chieko fit son entrée dans le lycée, suivant les pas de son frère qui avait également été lycéen ici. Celle-ci rejoignit le club de musique, envahissant celui-ci, qui était auparavant un des clubs les plus bordéliques du lycée, de sa capacité à faire somnoler tout le monde. Tout devint calme et volupté dans ce club. Les professeurs en étaient satisfaits, au moins, désormais, ce n'était plus la misère ! Peu de temps se déroula avant que des élèves admiratifs du fabuleux « pouvoir » de Chieko créée un fan-club secret. Nai progressa énormément en natation, le brun quant à lui semblait être à un niveau des plus hauts, il se fit d'ailleurs même repéré par des nombreuses personnes lors d'une compétition qu'il fit pour faire plaisir à son ami blond et à ses autres amis du club. À la surprise de tous, celui-ci refusa les avances de ces hommes et ces femmes, ce qui énerva également d'autres clubs de natation qui le traitait de « sale prétentieux ». Seuls les membres du club de son lycée restèrent amicaux, déclarant qu'il y avait plus important dans la vie. Nai restait insistant, le harcelant pour savoir pourquoi il ne voulait pas en faire sa profession, son attachement à l'eau était tellement fort après tout.
« Je n'ai pas envie de devenir un toutou contrôlé par un entraîneur, répondait-il tout le temps. »
L'année passait tout aussi vite que la première année, il est souvent dit que les années lycéennes sont les meilleurs mais ce sont également... les plus courtes, celles qui nous filent le plus entre les doigts puis... il est trop tard. En effet, de nombreux mois s'étaient déjà écoulés. La curiosité de Nai de voir Chieko en action dans le club de musique envahit peu à peu Kiku qui céda rapidement et accepta de l'accompagner faire un tour là-bas. Lorsqu'ils arrivèrent la fameuse salle du club, tous les membres étaient tranquillement train de prendre le thé.
« Bienvenus, Rin, Nai... »
Il y avait deux places libres auprès de Chieko, deux tout pile, pas plus, comme si la jeune lycéenne avait prédit l'arrivée des deux garçons. Quelqu'un se leva, un des adhérents du club, leur servit du thé aimablement avant de revenir là ou il était. Les deux garçons se mirent à boire tranquillement leur tasse de thé, discutant tranquillement avec la petite musicienne. Kiku sembla ailleurs pendant un moment, observant le comportement des compatriotes de Chieko d'un air émerveillé. Nai afficha un petit sourire, le taquinant comme quoi derrière son air impassible, il s'émerveillait de tout et n'importe quoi, comme un gosse.
« Prendre le thé est primordial avant de se mettre... à utiliser nos instruments de musique. Après avoir été totalement détendu par ce moment de sérénité, nous pourrons jouer avec facilité du Mozart ou... du Bach, expliqua la lycéenne.
- Heeein ? Vraiment ? s'étonna Nai
- Oui... surtout si le thé en question est du thé noir aromatisée à la camomille comme celui que j'ai en ce moment, tiens... prends ma tasse et goûte... oh... j'y pense... cela tombe assez bien que vous soyez venus aujourd'hui tous les deux... enfin, surtout toi, Rin, car j'avais quelque chose à te dire. Il faut que je te préviennes, malgré qu'il m'ait dit de ne pas le faire... ce qui est stupide. Ce dont je dois t'avertir, c'est de l'arrivée de mon frère... il est revenu pour quelques semaines et il compte venir te voir après le dîner.
- Je... merci de m'avoir prévenu, murmura Kikunae. »
Les membres du club durent se mettre au travail et il était également temps pour Nai et Kikunae de partir : ils étaient en retard à l'entraînement. Le capitaine du club de natation ne les condamnerait pas, il était génial, ce type... mais ce n'était pas pour autant qu'il fallait profiter... Lors de l'entraînement, Nai ne perçut pas la nage de Kikunae comme d'habitude. Il nageait d'une beauté différente, une beauté empli de contrariété ou bien peut-être de peur, d'appréhension. De plus, celui-ci resta distant et déjà qu'il était taciturne, là il était limite... muet. Cette fois-ci, lorsque l'entraînement se termina, Nai rentra chez lui, ne suivant pas Kiku. Celui-ci ne se posa pas de question, revenant chez lui avec assez d'appréhension, se demandant comment il devrait agir lorsqu'il verrait Naoya en face de lui. Il réalisa alors qu'il avait été tellement égoïste lorsque Naoya était parti. Il avait eu dix sept ans peu de temps auparavant et lors de ses dix huit ans et... de la fin de la troisième année, il devrait lui aussi partir, voler de ses propres ailes... se libérer ! Retenir Naoya, cela aurait été comme le tenir en cage, le retenir vers le sol et il ne se serait jamais envolé. Derrière les fourneaux, le garçon se mit à préparer de quoi dîner. Il adorait cuisiner, lorsqu'il cuisinait, il était dans un autre monde. Le fait que Naoya devait lui rendre visite s'était comme dissipé, inconsciemment, il avait oublié qu'il devait venir. Tout de même distrait, il fit malheureusement trop de nourriture pour lui tout seul. Cela ne le perturba pas longtemps, il mangerait un peu plus, ce soir-là, voilà... Il posa donc tous les plats sur la table de la cuisine avant de s'installer sur une chaise et de se mettre à manger le plus tranquillement du monde quand soudainement, quelqu'un frappa à la porte. Le lycéen se leva une brochette de poulet à la bouche et alla ouvrir innocemment avant de se retrouver face à Naoya. Il se souvint alors de la conversation qu'il avait eut il n'y a pas si longtemps que cela avec Chieko.
« Je peux entrer ? »
Le garçon à la chevelure noire hocha la tête bien qu'il restait immobile devant la porte. Le regard lumineux de son vieil ami croisa le sien, ce qui lui fit détourner du regard. Il tourna ainsi les talons avant de le mener dans le salon et de continuer son repas. Il ne disait rien, regardant son assiette, il avait le regard fuyard. Naoya avait ce sourire habituel, ce sourire qui inspirait la plus grande gentillesse, la douceur.
« Je n'arrive pas à croire que le Kiku-chan que j'ai en face de moi est le même que celui que j'ai quitté... j'ai toujours l'impression que tout s'est déroulé hier... Que le temps passe vite ! constata alors Naoya
- C'est parce que je ne suis pas le même. Je n'ai plus quatorze ans.
- Oui... c'est vrai. Tu as fêté tes dix sept ans il y a deux jours... joyeux anniversaire et désolé pour retard.
- Merci.
- Tu sais Kiku-chan... il y a quelque chose dont je veux te parler... je n'en ai parlé à personne, même pas à ma famille, tu seras le premier à entendre la nouvelle. Bien. Ce que je veux te dire, c'est que je vais vivre ici, à Imari, révéla-t-il
- Tu... tu as terminé tes études ?
- Oui. Je suis photographe, désormais. Adieu le statut d'étudiant ! plaisanta le jeune homme aux yeux verts
- Pourquoi être revenu ici ? demanda le nageur
- Je ne quitterai pas... je te le promets... quelque chose comme cela... ça te parle ?
- Tu reste pour m... Je te demande pardon, Naoya, déclara le lycéen, honteux
- Je ne t'en ai jamais voulu... je suis le seul à blâmer. J'aurais du te retenir et t'expliquer que j'allais revenir. »
Le garçon aux yeux bleus invita son vieux camarade à terminer le dîner avec lui. Celui-ci accepta avec le plus grand plaisir. Les deux garçons se racontèrent la partie de leur vie que l'autre ne connaissait pas, à coup d'anecdotes, ne faisant que citer les nouvelles rencontres qu'ils avaient eu. Naoya montra sur une carte l'appartement qu'il allait louer, qui n'était pas si loin que cela de chez Kiku... comme ça, il pourrait se voir plus souvent. Ils avaient également prévu de se voir pendant les vacances comme la fin de l'année approchait et les examens aussi... Une fois de plus, Nai était complémentent à la ramasse et révisa en compagnie de Kikunae. Avec tous les efforts qu'ils donnèrent, ils furent récompensés, en effet, tous les deux furent accepter en troisième année. Pour ce qui est de Chieko, elle passa les examens haut la main, à croire qu'elle avait, tout comme Rin, de grandes facilités. Celle-ci fut acceptée en deuxième année avec toute la joie de ses fans. Les vacances venaient enfin de commencer, trois semaines de repos durant les quelles Kikunae comptait étudier tout de même de temps à autre, voulant aider par la même occasion Nai afin qu'il passe une bonne année, moins stressante. Comme prévu, Naoya et Kiku se virent souvent, parfois accompagné de Nai alias l'incrusteur ou bien de Chieko, puis parfois, ils étaient tous les quatre. Lorsque Naoya était seulement avec Rin, il lui faisait des avances discrètes, que Kikunae faisait mine de ne pas comprendre. Il était assez apeuré, peut-on dire. C'est la première fois qu'il ressentait quelque chose comme ça... de l'amour, comme on appelle ça. Lui n'avait eut personne d'autre depuis que Naoya était parti... il se demandait si c'était le cas pour lui aussi. Imaginer que son ami avait eu d'autres relations l'effrayait un peu. Il accepta tout de même les petits baisers, leurs lèvres ne faisaient que se frôler, de son compagnon et qu'ils se donnent la main... seulement lorsqu'ils seraient tous les deux.
Malheureusement, Kiku ne se doutait pas que la semaine qu'ils venaient d'entamer était la dernière qu'ils allaient passer heureux. Tout allait se déclencher avec une lettre, une lettre de sa mère. Kikunae commença à s'inquiéter lorsqu'il découvrit que celle-ci avait été envoyée d'un hôpital de Tokyo. Dans cette fameuse lettre, la mère de Rin annonçait que son père et elle s'étaient séparés, ils n'étaient pas encore divorcés, mais cela devait arrivé rapidement. Seulement, son père n'aurait pas besoin de divorcer. En effet, la mère de Kiku était atteinte de la maladie de Hodgkin, une maladie terrible si elle n'est pas traitée rapidement. Les médecins s'en étaient rendus beaucoup trop tard qu'elle en était atteinte, les cellules cancéreuses avaient donc contaminé une grande partie de son corps et en particulier la moelle osseuse. Trop occupée par son travail, elle non plus ne s'était rendue compte de rien. La chimiothérapie n'ayant aucun effet sur le cancer, il lui restait peu de temps à vivre. Son père n'était au courant de rien, elle avait demandé à ce qu'il ne soit pas prévenu, car... ce qu'elle voulait, c'était vivre ses derniers moments avec son fils bien aimé. Toutes ces terribles nouvelles dévasta le lycéen. Celui-ci annula toutes ses petites balades avec ses amis et ses révisions avec le pauvre Nai. Alarmé et inquiet par de tels actes, Naoya prit peu de temps pour lui faire cracher le morceau. Il décida de l'accompagner afin de l'aider durant cette lourde épreuve. Les deux garçons prirent donc le train pour Tokyo, proches comme deux petits amoureux. Pourtant, tout ce que à quoi pensait Rin c'était pourquoi sa mère ne l'avait pas prévenu de tout ça avant... la séparation... le cancer... il se prenait tout dans la face d'un grand coup violent. Il la trouvait égoïste également... elle voulait mourir en sa compagnie, devant ses yeux... c'était vraiment quelque chose d'horrible... d'horrible. Tous les deux... son père... sa mère... ils en avaient toujours rien eu à foutre de ce qu'il ressentait... À se demander s'ils l'avait aimé un jour ! Malgré tout, lorsqu'ils arriveraient à l'hôpital, il ne demanda pas de réponses à ses questions... et n’engueula pas sa mère. Elle voulait vivre de derniers jours avec bonheur. Le lycéen ne passa que trois jours avec sa mère avant qu'elle ne meure de son cancer. Malgré toute la souffrance qui la touchait, elle avait gardé ce faible et tendre sourire qui transperçait le cœur de Kikunae. Naoya l'avait vu retenir ses larmes, se forcer à sourire... Ça faisait mal de le voir se forcer à sourire... lui qui souriait si peu... et voilà que les seuls sourires qui se dessinaient sur ses lèvres étaient forcés... Ce n'est qu'après les funérailles qu'il explosa, un soir alors que Naoya et lui se promenaient au bord d'une rivière longée par des magnifiques cerisiers en fleurs. Kikunae s'effondra au sol, s'écorchant violemment ses faibles genoux. Ses larmes avaient formé un torrent déchaîné et ses cris déchirants heurtait au plus haut point Naoya. Un air tolérant sur le visage, le jeune homme accourut vers le lycéen avant de le serrer fort dans ses bras. Cela dura une voire deux heures. Des heures insoutenables pour le garçon aux yeux d'émeraude. Le garçon à la chevelure noire demanda alors à son ami de le laisser seul un petit moment, ce qui est compréhensible. Celui-ci s'exécuta, se dirigeant vers l'hôtel dans lequel ils logeaient. Kiku ferma les yeux lentement, posant ses mains au sol, tentant de se calmer... de se détendre un peu. Il leva doucement la tête vers le ciel, prenant une grande bouffé d'air. Il sentit une douleur agréable envahir son cœur, comme une force inconnue. Il sentait l'odeur de la rivière, des cerisiers en fleurs, de la terre humide, les vibrations des voitures sur le sol, entendait le ronronnement des moteurs des quelques voitures qui s'aventuraient encore dans la grande ville, le mouvement du vent passant entre les branches des arbres, le cours de la rivière. Tout à coup, il ouvrit les yeux et vit alors quelque chose d'extraordinaire. Les pétales tombées au sol lévitaient dans les airs tout autour de lui et diffusaient une belle et douce lueur. Le garçon posa son regard sur ses mains tremblantes. Était-ce lui qui était à l'origine de cela ? Non... ce n'était pas... possible... et pourtant ! comment cela aurait-il pu arriver alors ? Il devait en avoir le cœur net. Le garçon se leva lentement avant de se diriger vers la rivière et d'y entrer tout habillé. Il ferma alors les yeux, sentant ses vêtements lui coller à la peau puis posa son regard sur la lune resplendissante. Il se concentra alors sur ses mains et après quelques tentatives, il réussit à faire léviter l'eau dans les airs, à son tour. Il n'en croyait pas ses yeux... lui, Rin... avait des pouvoirs ? Comment cela était-il possible ? Était-il le seul sur Terre à pouvoir faire ce genre de choses ? En tout cas, il devait faire très attention... car, il semblait ne pas vraiment contrôler cela et... personne ne devait voir cela. Soudainement, Kikunae se paralysa. La peur envahit son corps. Il ne savait pas contrôler ses pouvoirs... et si cela devenait dangereux ? S'il faisait du mal à quelqu'un ? À Nai, à Chieko ou encore... à Naoya ? Non... jamais il ne se le pardonnerait. Le brun se mit trembler de panique, puis tout à coup, une grosse branche vola avec violence au loin. C'est bien ce qu'il croyait... Il n'avait plus sa place ici... en société... auprès de ceux qu'il aiment. Il devait partir... il n'avait pas d'autre choix. Le garçon rentra à l'hôtel trempé de la tête aux pieds et se planta devant Naoya qui était resté réveillé à l'attendre, un air grave sur le visage.
« Tu... tu t'es baigné Kiku-chan ?! Je comprends ton adoration pour l'eau, mais... il fait beaucoup trop froid, tu pourrais tomber malade ! s'inquiéta Naoya
- Je dois partir, Naoya.
- Hein ? Comment ça ? Po... Pourquoi ? Où ça ? questionna-t-il
- Je dois partir loin... pour vous protéger... pour te protéger.
- Qu'est-ce que tu racontes ? Tu as pris un coup sur la tête ou quoi ?
- Ne poses pas plus de questions, c'est assez douloureux ainsi.
- Justement, le fait que tu ne me dises rien de plus, ça fait mal aussi ! Quelle ironie, je t'ai dit que je ne quitterai jamais et c'est toi qui m'abandonne... déclara-t-il, riant jaune
- Je... je suis désolé... je ne voulais pas partir, seulement... je suis obligé, sanglota presque Kiku
- Ne t'excuses pas, vas... Je ne t'en voudrais jamais... je t'aime trop pour t'en vouloir...
- Tu... tu ne devrais pas m'aimer ain... ainsi.
- C'est un amour à sens unique, j'imagine, soupira le jeune homme à la chevelure marron
- Fais ce que tu veux de la maison, elle n'est à plus personne désormais. C'était... la propriété de ma mère. Voici les clés.
- Oh... tu avais gardé le porte-clés... »
Le garçon ferma sa valise, la prenant fermement en main. Il ne prit même pas le temps de changer de vêtements, gardant ceux qu'ils avaient sur lui, trempés. Il ne partit pas tout de suite, se dirigeant vers le jeune homme. Il s'approcha au plus près de celui-ci, rougissant un peu et retenant une larme. Il lâcha la valise, qui fit un gros bruit lorsqu'elle rencontra le sol puis il mit son visage au plus près de celui de son ami, entourant ses hanches de ses bras. Désormais, il était plus rouge que jamais. Il dut se mettre sur la pointe des pieds et dut obliger Naoya à se baisser pour qu'il puisse enfin lui offrir un long et doux baiser, un vrai baiser. Naoya prit la main Rin et lui posa le porte-clés du quel il avait enlevé toutes les clés de la maison entre temps. C'est la première fois que Kikunae l'embrassait de son propre grès. Le lycéen fronça les sourcils, la tristesse envahit son corps. Il ne voulait pas partir... mais il devait le faire. Il ferma doucement sa main.
« Je t'aime Naoya, susurra le nageur
- Je... je t’attendrai ! Cette maison... c'est aussi la tienne !
- Je ne pourrais jamais revenir. »
Le jeune homme resta bouche-bée, il ne savait pas quoi dire, il avait juste envie de pleurer. Il voulait se retenir, il ne voulait pas que Kikunae parte avec une image triste de lui en tête. Seulement, c'était plus fort que lui, il échoua et les larmes dominèrent son visage. Le lycéen tourna les talons, il ne voulait pas voir plus longtemps son visage sinon... il ne partirait jamais.
Kikunae fit de l'auto-stop afin de quitter la ville, de se perdre dans la campagne, il se retrouva même dans un bateau, changea de continent, il était loin, il était nulle part, il ne savait plus où il allait, ni où aller, c'était la fin pour lui, c’était mieux ainsi, sa place n'était nulle part, il n'avait plus de place tout court, son cœur lui faisait mal, ses amis lui manquait, il n'aurait jamais du dire à Naoya qu'il l'aimait, il devait en souffrir, il avait également été agressif sur les derniers mots, il était un monstre, il était affreux, il devait l'oublier, il devait le oublier, il effaça Naoya, Nai, Chieko, ses parents, ses amis, tout le monde de sa mémoire, il avait faim, il était sale, il avait envie de nager, juste nager... être libre, ne faire qu'un avec l'eau, s'immerger, se noyer, mourir, partir, un bâtiment bleu, bleu comme l'eau, de l'eau... boire, nager... du poisson, peut-être est-ce ici sa place, dans cet endroit au quel il arrivait sans savoir comment, cet endroit nommé... Fairy Dream School Academy.
Note : Je suis d'accord avec vous si vous pensez que l'histoire de mon personnage est basée principalement sur de la romance, seulement... c'est ainsi ! C'est sa viiiie ! ^o^ Je dois être une peu niaise aussi, à cause des shōjo des shōnen-ai, ah ah. J'aimerais tout de même, ici et tout de suite, poser un petit avertissement. Bien que j'aime beaucoup le shōnen-ai, je trouve ça trop mignon, je ne ferais aucun RPG avec des scènes "osées" ! Qu'on se le dise tout de suite... >///< Je suis désolée s'il y a des adeptes de RPG hentai, yaoi ou yuri sur le forum, mais... ça ne sera pas avec moiii !